Et si l’épidémie covid-19 était le catalyseur du paiement mobile ?
Si l’épidémie Covid-19 a eu un impact positif sur l’économie, c’est bien sur le paiement dématérialisé ! Non seulement on se méfie des paiements en espèces potentiellement contaminées par le virus, mais la pandémie a favorisé un usage massif du paiement sans contact dans le Retail.
Dans le même temps, les efforts initiés depuis plusieurs années sur le paiement mobile convergent pour favoriser l’adoption du paiement mobile.
e Coronavirus a été le déclencheur des nouvelles habitudes de paiement sans contact
En matière de paiements, les habitudes des consommateurs évoluent plutôt lentement. Si la première carte de paiement sans contact a été lancée par Banque Accord (filiale d’Auchan) en 2007[1], il a fallu attendre des années pour voir la part du sans contact passer à 30% en septembre 2019, et seulement quelques mois pour dépasser 65% en juin 2020 (source : étude BRI sur 10 pays européens) !
La guerre des Wallets universels aura bien lieu
Cela fait quelques années que les prédictions tablent sur un déploiement rapide du paiement mobile. Dans un contexte mondial, la puissance des xPay – et particulièrement d’Apple Pay – leur a donné une longueur d’avance sur des offres natives de « Wallet » universel, c’est-à-dire un portefeuille virtuel de cartes dématérialisées utilisable dans le Commerce. En France, les banques ont bien essayé de riposter avec l’offre « Paylib sans contact » mais le succès reste très mitigé…
Sur le plan technique, les xPay s’appuient sur la technologie de tokenisation de Visa et Mastercard. Après un enrôlement, la carte physique du payeur est cryptée pour générer un clone avec son identité propre. Ensuite, les services d’autorisation sont opérés par Visa (VTS) et Mastercard (MDES). Les banques se trouvent donc marginalisées tant sur le Wallet que sur les paiements eux-mêmes.
Pour reprendre la main sur le paiement et le mobile, les banques européennes créent le schéma EPI
En 2020, 16 banques ont annoncé le schéma de paiement EPI. Cette initiative basée sur le virement (SEPA Credit Transfer) se déclinera sous forme de cartes associées à l’IBAN du payeur, compatibles avec les équipements de paiement existants, et d’un Wallet mobile permettant un « Request To Pay » – un mécanisme standardisé permettant d’initier le paiement via l’open banking pour un transfert d’argent direct du payeur vers le bénéficiaire.
EPI pourrait voir le jour dans quelques années, offrant ainsi aux banques une alternative pour se repositionner sur l’offre de Wallet universel et les paiements.
En parallèle, les nouvelles obligations d’authentification forte du payeur se dérouleront sur mobile
Le SMS du 3D Secure pour valider un paiement à distance disparaitra fin 2020. En effet, la DSP2 européenne impose aux établissements de paiement de réaliser une authentification forte du payeur en toutes circonstances (sauf cas d’exemption). Les banques en profitent pour renforcer leur application de banque mobile étant donné que le smartphone contient tous les attributs nécessaires pour réaliser l’authentification forte : écran de saisie de code, espace d’exécution sécurisé et fonctions biométriques. Selon la Banque de France, 70% des clients seraient déjà éligibles avec leur smartphone.
Pour le consommateur, si l’épidémie Covid-19 a stimulé de nouvelles habitudes de paiement, tous les signaux sont au vert pour se laisser séduire par le paiement mobile.
La généralisation du paiement mobile transforme l’acte d’achat omnicanal
Les enjeux du paiement mobile sont majeurs puisqu’ils permettent de maitriser l’expérience client des paiements tant dans les magasins physiques que pour la vente à distance, et surtout de créer les expériences phygitales souhaitées par le Commerce.
Cette évolution va, à court terme, créer de nombreuses opportunités autour du Commerce :
Pour les banques et prestataires de services de paiement
Ces acteurs peuvent capitaliser sur les capacités de tokenisation des cartes bancaires sur mobile pour renforcer le lien client / commerçant – par exemple proposer des cartes digitales pour développer le crédit au consommateur (Exemple : Stripe issuing). Ils ont aussi intérêt à se positionner sur le schéma EPI et l’open banking pour préparer leur avenir.
Leur rôle consiste également à accompagner les marchands sur l’acceptance : lutte contre la fraude, interopérabilité des terminaux de paiement (cf. standards nexo), paiements alternatifs et méthodes asiatiques (Alipay/Wechat) afin d’offrir tous les services d’ingénierie de la transaction aux commerçants.
Pour les acteurs du Retail et du e-Commerce
Ces acteurs ont un besoin vital d’intégrer leurs solutions d’encaissements aux nouveaux parcours d’achat omnicanal sur mobile. Dans les commerces de proximité, l’acceptation sans contact est standardisée, mais lorsque le paiement se réalise avec un smartphone, l’outil peut être exploité pour proposer des services intuitu-personae, consentis (au sens RGPD[2])et géolocalisés : avantages fidélité, coupons, offres localisées, garanties, facilités de trésorerie ou de crédit, etc. Le paiement mobile devient le graal de la relation client !
Aussi, dans le monde ouvert du mobile, les marchands font évoluer leur marketing avec le paiement pour tirer parti des données collectées dans la relation d’achat (par exemple, une tokenisation de la carte pour faciliter des achats futurs – Card on File – ou l’intégration d’une carte de fidélité au Wallet du payeur), tout en garantissant la sécurité et en optimisant les coûts de traitement…
L’aventure du paiement mobile est bien lancée, c’est maintenant que l’avenir se prépare…
Toutes les marques citées sont la propriété de leur dépositaire respectif.
[1] L’auteur de cet article a accompagné Banque Accord et Mastercard sur le lancement de cette offre innovante.
[2] RGPD : Règlement Général sur la Protection des Données – une obligation réglementaire européenne
François Lecomte-Vagniez
Consultant indépendant Offre Digitale & Paiements
www.lobary.com